édition spéciale de poil à gratter en direct de Chine

Le compte n’est pas bon

Ils ont beau compter, recompter, sortir le boulier, rien n’y fait. Trois statistiques viennent de confirmer que nos amis chinois ont un vrai problème avec leur économie :

• La population chinoise s’est réduite de plus de 2 millions d’individus l’année dernière, avec à peine 9 millions de naissance (le plus bas niveau depuis l’instauration de ces statistiques en 1949) et dans le même temps 11 millions de décès (là encore, un record). Si les décès supplémentaires peuvent au moins en partie être attribués au Covid suite à la réouverture brutale du pays, le problème de natalité est nettement plus structurel. Après 35 ans de politique de l’enfant unique, les gouvernements central et locaux rivalisent d’inventivité pour essayer d’envoyer les jeunes chinoises à la maternité. Mais c’est pas gagné.
• Raison de plus pour ne pas faire d’enfants, les jeunes chinois peinent de plus en plus à trouver du boulot. Après six mois de suspension des statistiques officielles de ch?mage des jeunes, le bureau national des statistiques vient tout juste de publier… un nouvel indicateur. Celui-ci exclut désormais la population étudiante, ce qui permet d’afficher de bien meilleurs chiffres. Encore un bel exemple de la solution vieille, comme le monde qui consiste à casser le thermomètre lorsqu’on n’est pas content de la température… Les analystes en revanche, estiment que la situation a continué à se dégrader.
• Par ailleurs, le marasme s’aggrave dans l’immobilier avec une chute des prix de l’immobilier résidentiel la plus forte depuis 8 ans. Les 100 principaux promoteurs du pays ont enregistré en décembre un effondrement vertigineuse de près de 35 % de leurs ventes par rapport à l’année précédente, après une baisse de 30 % en novembre. Dans ce contexte, les craintes de défaut des géants de l’immobilier ne sont pas près de s’éloigner.

Pivoter pour survivre

Conséquence probable de ce qui précède, les résultats de l’enquête sur le moral des dirigeants menée par PwC est édifiante pour la région Asie-Pacifique : 63 % des dirigeants interrogés (représentant des entreprises de toutes tailles) indiquent qu’ils ont des incertitudes concernant la survie à long terme de leur entreprise. C’est 10 % de plus que l’année dernière et 18 % au-dessus de la moyenne mondiale.

Les risques liés à l’inflation, aux tensions géopolitiques et à l’environnement macro-économique ont amené 97 % des CEO interrogés à travailler activement sur un pivot de leur business model.

En attendant, de plus en plus de fonds d’investissement internationaux se détournent de la Chine. Dans une enquête de Bank of America, les montants investis dans des valeurs chinoises ont fondu de 12 % le mois dernier, et 78 % des fund managers estiment qu’il s’agit d’un déclassement structurel.

Les bourses chinoises et de Hong Kong sont en berne alors que les analystes anticipe une consommation très déprimée des ménages chinois.

Elles volent en escadrilles

Comme un problème n’arrive jamais seul, les cousins ta?wanais ont réélu samedi le parti indépendantiste à la présidence du pays malgré les fortes pressions qu’avait exercées Beijing ces derniers mois, notamment par l’intermédiaire des organisations criminelles locales (triades) notoirement affiliées à la Chine communiste.

L’ambassadeur de Chine à Washington s’est empressé de délivrer un message sans aucune ambigu?té : ??aujourd’hui, la question de Taiwan reste la plus importante, la plus sensible et la plus explosive dans les relations entre les deux pays??. Il a ajouté, au cas où on ne s’en douterais pas,?? la Chine ne deviendra pas un autre états-Unis??.

On se rassurera pour le moment en se rappelant que dans son histoire la Chine n’a eu recours qu’extrêmement rarement (et encore plus rarement avec succès) à la force armée pour régler ses différends avec ses voisins, préférant appliquer les bons vieux préceptes de Sun Tzu qui conseillait de tout tenter pour vaincre sans combattre.

D’ailleurs cette fois-ci l’Armée de Libération du Peuple a attendu 5 jours - ce qui est rare - pour envoyer ses jets patrouiller dans le ciel ta?wanais.

Papy fait de la résistance

Ces jours-ci se déroule à Hong Kong le procès très médiatique du tycoon Jimmy Lai, ancien propriétaire de la cha?ne de vêtements Giordano mais surtout du tablo?d Apple Daily.

à 76 ans, Mr Lai est accusé par les autorités d’avoir conspiré avec des forces étrangères au moment des manifestations pro-démocratiques en 2019. Plusieurs membres de son comité de direction de l’époque ont confirmé devant la cour les crimes de leur ancien patron, notamment celui de ??promouvoir la démocratie et la liberté et s’opposer au totalitarisme??.

En vertu de la récente loi de sécurité nationale, Mr Lai risque rien moins que la réclusion à perpétuité.

Et sinon, il para?t qu’en France on frise la dictature.

Bon petit soldat

Il y en a un qui ne risque rien, c’est l’éditorialiste du South China Morning Post, le très sérieux quotidien en langue anglaise de Hong Kong qui appartient désormais au groupe Alibaba, grand ami du pouvoir et promoteur des vues du parti communiste chinois.

Dans l’édition de ce matin, il dézingue violemment Joe Biden en le rendant carrément responsable de la guerre en Ukraine et du conflit israélo-palestinien.? Il n’hésite pas à affirmer contre toute évidence que les états-Unis apportent ??un soutien inconditionnel aux massacres perpétués par Isra?l??. Et il appelle de ses v?ux une nouvelle élection de Donald Trump à ce qu’il appelle la ??présidence impériale?? des états-Unis.

En lisant entre les lignes, on comprend que l’aversion de Donald Trump pour les conflits armés semble le rendre sympathique aux yeux du gouvernement chinois. à suivre.

Une tempête dans un verre d’eau

Comme on s’ennuie un peu en Asie ces jours-ci, une grande enquête est menée pour donner un nom aux prochains typhons. Pas moins de 20 000 résidents de Hong Kong en participé au vote (pour une fois qu’ils peuvent voter pour quelque chose) et ont porté à la première place ??milk tea??.

Parmi les autres noms qui arrivent en haut de la liste, on trouve aussi ??dim sum?? et ??red bean??. Il faudra que quelqu’un leur disent qu’un typhon, ?a ne se mange pas…

N’est pas Singapour qui veut

à la lecture du signe ci-dessous, vu dans le Star Ferry entre Central et Kowloon, on se rend compte que les Hong Kongais ont encore quelques progrès à faire en maths…

Gooooooooal

Pour finir sur une note positive, on notera le premier but de l’équipe nationale de foot de Hong Kong en coupe d’Asie des nations depuis… 56 ans.

Le but du dénommé Chan (l’article ne dit pas s’il s’agit de Jackie) n’a malheureusement pas suffi à empêcher la défaite de son équipe contre les émirats Arabes Unis.

Autre point positif, les internautes chinois ont salué la belle prestation de l’équipe de Hong Kong, y compris le recours à des joueurs d’origine étrangère. Comme aurait dit (presque) Deng Xiaoping, peu importe qu’un joueur soit noir ou blanc, du moment qu’il marque des buts.

Mais après, quoi court-il ?

Vous l’aurez compris, Poil à Gratter, s’est relocalisé pour quelques jours à Hong Kong, la ville de son c?ur.

Il va tenter au passage de boucler sa première course de plus de 100 km dans les Nouveaux Territoires.

Cette partie de Hong Kong, très sauvage et peu habitée, est en réalité la raison pour laquelle le territoire a été rendu à la Chine en 1997. L’?le de Hong Kong et la péninsule de Kowloon, que tout le monde conna?t, avaient en effet été cédés de fa?on perpétuelle aux britanniques au XIXe siècle. Ce ne sont que les Nouveaux Territoires, indispensables à la survie de la ville notamment pour son approvisionnement en eau, qui avaient fait l’objet d’un bail de 99 ans. Lors des négociations menées par Margaret Thatcher, le Royaume-Uni a finalement décidé d’abandonner la totalité de son ancienne colonie.